Par Peter Amsterdam
mai 25, 2024
[The Ten Commandments (Authority, Part 3)]
Peter Amsterdam
L’autorité gouvernementale (Suite)
Si la Bible enseigne que le gouvernement civil est ordonné par Dieu et que les chrétiens doivent lui obéir[1], elle affirme également que le gouvernement a la responsabilité de garantir et de sauvegarder les droits de l’homme et sa liberté de choix. Le libre arbitre est une composante essentielle de l’être humain et participe de la ressemblance à Dieu et de son image.
D’un bout à l’autre de la Bible, nous voyons que Dieu protège toujours les choix humains. Il peut très bien désapprouver les choix des individus et décider de les punir d’avoir exercé leur libre arbitre pour se rebeller contre Lui ou pour faire du mal et opprimer d’autres personnes, mais Il ne leur ôte pas la liberté de faire leurs propres choix. Les gouvernements qui protègent les droits fondamentaux de l’homme et garantissent à leurs citoyens la liberté de faire des choix personnels (qui n’empiètent pas sur les droits d’autrui) reflètent cet aspect de Dieu, tandis que ceux qui nient à leurs citoyens des droits fondamentaux leur volent une partie de leur humanité.
Bien sûr, tous les gouvernements empiètent dans une certaine mesure sur la liberté des citoyens en adoptant des lois qui interdisent aux individus de nuire à autrui. Les lois réprimant le vol, le meurtre et l’enlèvement, par exemple, peuvent toutes être considérées comme une atteinte au libre arbitre de ceux qui veulent commettre ce type d’actes malveillants ; toutefois, ces lois sont appropriées et nécessaires pour protéger la vie et le bien-être d’autrui. Les objectifs de la punition institutionnelle sont : la dissuasion, puisque les gens savent qu’ils encourent une punition s’ils enfreignent la loi ; la protection, puisque la menace d’une punition empêche les gens de commettre un délit au détriment d’autres personnes ; la rétribution, qui fait payer aux criminels la sanction pour le mal qu’ils ont commis ; et la correction, puisque, dans l’idéal, la punition devrait contribuer à amender la personne qui a commis le crime afin qu’elle ne continue pas dans cette voie. Punir les gens qui enfreignent la loi est légitime car cela protège les innocents, décourage le crime et frappe l’auteur du délit d’une forme de rétribution.
Dans l’Ancien Testament, le gouvernement du peuple hébreu de Dieu était une « théocratie », en ce sens que la nation tout entière était considérée comme étant « le peuple de Dieu ». À ce titre, les lois qui régissaient le peuple comprenaient des lois que l’on considérerait aujourd’hui comme relevant du droit pénal, comme le vol, l’homicide involontaire et le meurtre, mais aussi des lois qui traitaient de questions religieuses, comme la manière appropriée d’adorer Dieu et de Lui offrir des sacrifices d’animaux.
À l’époque de Jésus, la nation d’Israël était sous l’autorité politique de Rome et devait obéir aux lois romaines. Certes, Jésus approuvait le concept de gouvernement et l’obligation de payer des impôts, mais Il faisait également une distinction entre la sphère d’influence du gouvernement et celle du « peuple de Dieu ». Un jour, quelqu’un demanda à Jésus :
« Dis-nous donc ce que tu penses de ceci : A-t-on, oui ou non, le droit de payer des impôts à César ? Mais Jésus, connaissant leurs mauvaises intentions, leur répondit : —Hypocrites ! Pourquoi me tendez-vous un piège ?Montrez-moi une pièce qui sert à payer cet impôt. Ils lui présentèrent une pièce d’argent. Alors il leur demanda : —Cette effigie et cette inscription, de qui sont-elles ?—De César. Jésus leur dit alors : —Rendez donc à César ce qui revient à César, et à Dieu ce qui revient à Dieu. »[2]
En faisant cette distinction entre les choses qui relèvent du gouvernement et celles qui relèvent de Dieu, Jésus reconnaissait un changement fondamental par rapport au concept de l’Ancien Testament selon lequel le gouvernement et les autorités religieuses étaient essentiellement une seule et même chose. L’État et la religion n’étaient plus indissociablement liés, mais constituaient désormais deux entités bien distinctes.
Selon cette affirmation, l’Église et l’État ont des compétences différentes et chacun doit respecter le champ d’action et le domaine d’autorité de l’autre. L’Église ne doit pas contrôler les décisions et les actions de l’État, et l’État ne doit pas empiéter sur la liberté de culte de ses citoyens. Dans le Nouveau Testament, rien n’indique que les responsables des églises locales aient exercé des responsabilités politiques ou gouvernementales. Au contraire, les responsables gouvernementaux étaient distincts des responsables de l’Église. Nous lisons que Jésus refusa de jouer un rôle de médiateur dans un conflit financier entre deux frères, car cela relevait du domaine juridique civil.
Du milieu de la foule, un homme dit à Jésus : « Maître, dis à mon frère de partager avec moi l’héritage que notre père nous a laissé ! Mais Jésus lui répondit :—Mon ami, qui m’a établi pour être votre juge ou votre arbitre en matière d’héritage ? »[3]
Il ressort des enseignements de Jésus que l’Église n’avait pas vocation à gouverner l’État. Cela implique, par exemple, que le pouvoir politique exercé par l’Église au Moyen-Âge, lorsque différents papes voulurent affirmer leur pouvoir sur les gouvernements civils des rois et des empereurs, était illégitime puisque cela n’était pas du ressort de l’Église. Cela ne veut pas dire qu’il est interdit aux chrétiens d’essayer d’influencer la politique du gouvernement pour qu’elle reflète les principes du christianisme ; ni qu’il serait inapproprié qu’ils travaillent pour un gouvernement ou même qu’ils en fassent partie ; cela signifie qu’il n’est pas du ressort de l’Église de contrôler le gouvernement civil, puisque ces questions appartiennent à César.
En vertu du même principe, le gouvernement civil ne devrait pas régir les choses qui sont du ressort de Dieu. Cela implique que les gouvernements doivent garantir la liberté religieuse en sorte que chacun puisse pratiquer la religion de son choix. Lorsque Jésus a nommé les douze disciples, Il n’a pas préalablement consulté les autorités romaines ni cherché à obtenir leur autorisation.[4] L’Église primitive n’a pas non plus consulté le gouvernement civil avant de désigner ses responsables.
C’est pourquoi, frères, choisissez parmi vous sept hommes réputés dignes de confiance, remplis du Saint-Esprit et de sagesse. Nous les chargerons de ce travail.[5]
L’apôtre Paul a chargé Tite et Timothée de nommer des responsables dans l’Église en précisant les critères de sélection des candidats.[6] Le gouvernement civil ne se mêlait pas de nommer les responsables de l’Église. Cela reflétait l’enseignement de Jésus, selon lequel le gouvernement de l’Église et le gouvernement politique sont deux systèmes indépendants dont l’autorité s’exerce dans deux domaines bien distincts. À ce titre, le gouvernement civil n’a pas vocation à gouverner l’Église, mais devrait, au contraire, la laisser se gouverner elle-même.
Hélas, cela n’a pas toujours été le cas historiquement. À certaines époques dans le passé, des chrétiens ont pensé à tort que le gouvernement devait forcer les gens à croire d’une certaine façon. C’est ce qui a déclenché les guerres de religion entre catholiques et protestants aux XVIe et XVIIe siècles. C’est aussi ce qui a incité les églises protestantes réformées et luthériennes à persécuter et massacrer des milliers d’anabaptistes pour des raisons de divergences théologiques. Cette volonté de forcer ou d’obliger autrui à croire d’une certaine manière était condamnable et contraire aux enseignements du Christ. Heureusement, aujourd’hui, la majorité des chrétiens dans le monde ne croient pas que le gouvernement civil devrait obliger ses citoyens à embrasser une foi particulière.
Si nous prenons l’exemple de Jésus, Il n’a jamais forcé qui que ce soit à croire en Lui. Alors qu’Il se rendait à Jérusalem avec ses disciples :
Il envoya devant lui quelques messagers. En cours de route, ils entrèrent dans un village de la Samarie pour lui préparer un logement. Mais les Samaritains lui refusèrent l’hospitalité, parce qu’il se rendait à Jérusalem. En voyant cela, ses disciples Jacques et Jean s’écrièrent :—Seigneur, veux-tu que nous commandions à la foudre de tomber du ciel sur ces gens-là, pour les réduire en cendres ?Mais Jésus, se tournant vers eux, les reprit sévèrement.[7]
Jésus réprouvait que l’on puisse forcer les gens à croire en Lui.
L’exemple de Jésus montre qu’un chrétien devrait respecter le libre arbitre des gens. Dans ses enseignements, Il appelait les gens à choisir librement de Le suivre.
Venez à moi, vous tous qui êtes accablés sous le poids d’un lourd fardeau, et je vous donnerai du repos. Prenez mon joug sur vous et mettez-vous à mon école, car je suis doux et humble de cœur, et vous trouverez le repos pour vous-mêmes. Oui, mon joug est facile à porter et la charge que je vous impose est légère.”[8]
Après sa résurrection, nous voyons que les apôtres se concentrèrent sur l’enseignement et la discussion avec les gens afin de les amener à choisir en toute liberté de croire en Jésus et de Le suivre.
Lorsque l’apôtre Paul s’adressait aux responsables Juifs de Rome, il n’essayait pas de les forcer à croire ; au contraire, il essayait de les convaincre en leur annonçant le royaume de Dieu et en leur demandant de choisir en toute liberté de croire en Jésus.
Ils fixèrent donc un autre rendez-vous et, au jour convenu, revinrent chez lui, encore plus nombreux que la première fois. L’entretien dura du matin jusqu’au soir. Paul leur exposa sa doctrine : il leur annonça le règne de Dieu et, en s’appuyant sur la Loi de Moïse et les paroles des prophètes, il cherchait à les convaincre au sujet de Jésus. Les uns se laissèrent persuader par ses paroles, mais les autres refusèrent de croire.[9]
Dans le livre de l’Apocalypse, nous lisons également une invitation à prendre une décision de foi personnelle :
Et l’Esprit et l’Épouse disent :—Viens ! Que celui qui entend ces paroles dise :—Viens ! Que celui qui a soif vienne. Que celui qui veut de l’eau de la vie la reçoive gratuitement.[10]
Conformément aux Écritures, chacun est libre de choisir ses croyances religieuses.
Si l’Église n’a pas vocation à exercer le pouvoir civil, cela ne veut pas dire que les croyants ne devraient jamais chercher à influencer le gouvernement et sa politique. L’Ancien et le Nouveau Testament contiennent tous deux des exemples de croyants qui exercèrent une influence positive sur le gouvernement civil, et ces activités sont présentées sous un jour positif. Dans l’Ancien Testament, nous lisons que Joseph, l’un des fils de Jacob, devint un haut responsable du gouvernement égyptien aux ordres du pharaon, et que son influence permit aux Israélites de survivre à la famine qui dura sept ans.[11] Le prophète juif Daniel devint un haut responsable à la cour de Nabuchodonosor.
Le roi éleva Daniel à une haute position et lui donna de nombreux et riches présents ; il le nomma gouverneur de toute la province de Babylone et l’institua chef suprême de tous les sages de Babylone.[12]
À ce poste de responsabilité, il fut en mesure d’influencer la politique du gouvernement> et de guider le roi dans les voies de Dieu.
C’est pourquoi, ô roi, voici mon conseil : puisses-tu juger bon de le suivre ! Détourne-toi de tes péchés et fais ce qui est juste ! Mets un terme à tes injustices en ayant pitié des pauvres ! Peut-être ta tranquillité se prolongera-t-elle.[13]
Le prophète Jérémie conseilla au peuple juif qui avait été emmené en captivité et déporté à Babylone d’exercer une influence positive dans la ville.
Voici ce que déclare le Seigneur des armées célestes, Dieu d’Israël, à tous les exilés que j’ai fait déporter de Jérusalem à Babylone : Construisez des maisons et installez-vous y, plantez des jardins et mangez-en les fruits, mariez-vous et ayez des enfants ; mariez vos fils et donnez vos filles en mariage et qu’elles aient des enfants ! Multipliez-vous là-bas, et ne laissez pas diminuer votre nombre. Recherchez la prospérité de la ville où je vous ai déportés et priez l’Éternel en sa faveur, car de sa prospérité dépend la vôtre.”[14]
D’autres croyants de l’Ancien Testament occupèrent des postes au sein du gouvernement et purent donc avoir une certaine influence sur celui-ci. Néhémie, qui était l’échanson du roi perse Artaxerxès Ier, occupait un poste qui lui donnait directement accès au roi.[15] Dans le livre d’Esther, nous lisons que Mardochée le Juif était le bras droit du roi Xerxès.
En effet, Mardochée occupait un poste élevé au palais royal et son influence se faisait sentir jusque dans les provinces : c’était un personnage de plus en plus puissant.[16]
La reine Esther a également eu une influence positive sur le roi Xerxès.[17]
Dans le Nouveau Testament, nous lisons que Jean-Baptiste s’insurgea contre le comportement immoral d’Hérode Antipas, un dirigeant nommé par l’empereur romain.
En effet, Hérode avait ordonné d’arrêter Jean, l’avait fait enchaîner et jeter en prison, à cause d’Hérodiade, la femme de Philippe, son demi-frère, parce qu’il lui disait :—Tu n’as pas le droit de la prendre pour femme.”[18]
Mais il reprocha au gouverneur Hérode d’avoir épousé Hérodiade, la femme de son demi-frère, et d’avoir commis beaucoup d’autres méfaits. Hérode ajouta encore à tous ses crimes celui de faire emprisonner Jean.[19]
Nous lisons également que l’apôtre Paul s’adressa à Marcus Antonius Felix, le gouverneur romain de Judée et qu’il discuta de la juste manière de vivre, de la maîtrise de soi et du jugement à venir.[20] Il est fort probable que lorsque Paul discuta avec ce haut fonctionnaire, il en vint à aborder des questions morales et les notions personnelles du bien et du mal.
Bien que les premiers chrétiens n’aient jamais fait partie du gouvernement civil, ils firent de leur mieux pour l’influencer positivement. Nous qui sommes chrétiens devrions aussi nous employer à influencer positivement le gouvernement civil et la société en général par notre mode de vie, notre témoignage de chrétien, notre exemple, notre amour et notre compassion à l’égard autrui.
Note
Sauf indication contraire, toutes les citations bibliques sont extraites de La Sainte Bible, Version du Semeur, copyright © 2000 Société Biblique Internationale. L’autre version citée est la Bible en Français Courant (BFC). Tous droits réservés.
[1] Christianisme vivant, Les Dix Commandements : Autorité (2ème partie).
[2] Matthieu 22.17–21.
[3] Luc 12.13–14.
[4] Matthieu 10.1–4.
[5] Actes 6.3.
[6] 1 Timothée 3.1–13, Tite 1.3–9.
[7] Luc 9.52–55.
[8] Matthieu 11.28–30.
[9] Actes 28.23–24.
[10] Apocalypse 22.17.
[11] Genèse 41.37–45; 42.6; 45.8–9, 26.
[12] Daniel 2.48.
[13] Daniel 4.24.
[14] Jérémie 29.4–7.
[15] Néhémie 1.11.
[16] Esther 9.4 BFC.
[17] Esther 5.1–8; 7.1–6; 8.3–13; 9.12–15, 29–32
[18] Matthieu 14.3–4.
[19] Luc 3.19–20.
[20] Actes 24.25.
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