Les histoires racontées par Jésus : Le propriétaire compatissant, Matthieu 20:1–16

Par Peter Amsterdam

août 12, 2014

[The Stories Jesus Told: The Compassionate Employer, Matthew 20:1–16]

La parabole du propriétaire compatissant ou, comme on l’appelle souvent, des ouvriers dans la vigne, est une histoire que Jésus a racontée pour illustrer divers aspects de la nature et du caractère de Dieu : à savoir son amour, sa miséricorde et sa compassion, manifestés avec force à travers le salut, ainsi que son soin constant et ses récompenses pour ceux qui L’aiment et Le servent.

Cette parabole, comme d’autres racontées par Jésus,[1] débute par ces mots : « Voici, en effet, à quoi ressemble le royaume des cieux … » Cette phrase indique à ceux qui L’écoutent que Jésus va faire des révélations sur Dieu et sa nature, et sur la façon dont ceux qui vivent dans son royaume et acceptent son règne dans leur vie devraient voir les choses. Voyons maintenant ce que dit Jésus:   

Voici, en effet, à quoi ressemble le royaume des cieux : un propriétaire sort le matin de bonne heure afin d’embaucher des ouvriers pour travailler dans son vignoble.[2]

Dans d’autres versions de la Bible, le mot propriétaire est traduit par un maître de maison ou un employeur. Dans la Palestine du premier siècle de notre ère, la plupart des propriétaires cultivaient la terre. Dans cette parabole, le maître de maison possédait une vigne qui était suffisamment grande pour qu’il ait besoin d’ouvriers supplémentaires aux moments où il fallait que le travail soit fait rapidement, comme à l’époque des vendanges.

Ayant un besoin temporaire d’ouvriers supplémentaires, le propriétaire se rend sur la place du marché où sont rassemblés les travailleurs journaliers, lesquels espèrent que quelqu’un viendra leur proposer du travail, ne serait-ce que pour une journée. La vie était dure pour les journaliers de l’époque. Aucune sécurité de l’emploi. Ils n’avaient aucun revenu s’ils ne trouvaient pas de travail. Chaque soir, ils rentraient chez eux, ou bien heureux d’avoir gagné de quoi nourrir leur famille, ou, au contraire, les mains vides. Pour trouver du travail, ils se tenaient sur la place du village où tout le monde pouvait les voir et savait qu’ils étaient sans emploi. C’était pour le moins humiliant, mais il fallait absolument qu’ils se fassent embaucher et qu’ils touchent un salaire pour la survie de leur famille. Les travailleurs journaliers étaient tout en bas de l’échelle économique, à tel point que la Loi mosaïque exigeait que ces ouvriers soient payés à la fin de chaque journée de travail, tant ils avaient besoin de cet argent pour survivre.

Voici ce que dit Deutéronome 24:14–15 :

Tu n’exploiteras pas l’ouvrier journalier qui est d’humble condition ou pauvre … Tu lui donneras son salaire chaque jour avant le coucher du soleil, car étant pauvre, il attend sa paie avec impatience ; sinon il en appellerait à l’Éternel contre toi et tu porterais la responsabilité d’un péché.[3]

Le propriétaire de la vigne sort de chez lui de bon matin, pour embaucher des travailleurs pour une journée complète de travail. Il choisit certains ouvriers et convient avec eux du salaire qu’il leur paiera pour leur journée de travail. Comme les gens n’avaient pas de montre, la journée de travail d’un ouvrier commençait au lever du soleil et se terminait le soir, dès que la première étoile apparaissait dans le ciel. Cela faisait une journée de travail d’environ 12 heures.

Il convient avec eux de leur donner comme salaire une pièce d’argent pour la journée, puis il les envoie dans sa vigne.[4]

Une pièce d’argent [ou un denier] était le salaire normal de l’époque pour la journée de travail d’un ouvrier. Ce n’était pas un gros salaire mais cela suffisait pour subvenir aux besoins d’une famille. Les ouvriers tombèrent d’accord sur ce salaire, et il est probable qu’ils espéraient que le propriétaire les embauche à nouveau le lendemain matin. Ils se rendirent à la vigne, contents de savoir que ce soir-là, ils ramèneraient un salaire à la maison.

Continuons notre histoire. Le propriétaire retourne sur la place du marché pour embaucher d’autres ouvriers.

Vers neuf heures du matin, il sort de nouveau et en aperçoit d’autres qui se tiennent sur la place du marché sans rien faire. Il leur dit : « Vous aussi, allez travailler dans ma vigne et je vous paierai correctement. » Ils y vont.[5]

Le propriétaire se rend une deuxième fois sur la place du marché en milieu de matinée, aux environs de 9 heures du matin. Arrivé là, il voit des travailleurs qui attendent toujours d’être embauchés pour la journée. Il en choisit plusieurs et les envoie travailler dans sa vigne. Au lieu de négocier leur salaire avec eux, il leur promet de les payer correctement ; c'est-à-dire qu’il leur versera un salaire juste. Les ouvriers le croient sur parole, ce qui laisserait penser que le propriétaire était une personne à qui l’on faisait confiance et qui était respecté de la communauté.

Il sort encore vers midi, puis vers trois heures de l’après–midi et, chaque fois, il agit de la même manière.[6]

À midi, puis à trois heures de l’après-midi, il retourne sur la place du marché et, à chaque fois, il engage d’autres ouvriers. Aucune mention n’est faite d’une discussion entre le propriétaire et les ouvriers concernant le montant de leur salaire.

Un peu plus tard, il retourne sur la place du marché pour la cinquième fois de la journée, alors qu’il ne reste plus qu’une heure avant la tombée du jour.

Enfin, étant ressorti à cinq heures du soir, il en trouve encore d’autres sur la place. Il leur dit : « Pourquoi restez–vous ainsi toute la journée à ne rien faire ? » « C’est que personne ne nous a embauchés. » « Eh bien, vous aussi, allez travailler dans ma vigne ! »[7]

On ne peut qu’imaginer à quel point ces hommes étaient désespérés de trouver du travail, et le découragement qu’ils devaient ressentir d’avoir attendu en vain toute la journée, sur la place publique, que quelqu’un vienne les embaucher. Nul doute qu’ils voulaient vraiment trouver du travail, sinon ils ne seraient pas restés à attendre sur la place du marché dans l’espoir d’être embauchés. Encore un peu de temps et ils allaient devoir rentrer chez eux les mains vides.

Lorsque le propriétaire leur demande pourquoi ils sont restés là toute la journée, à ne rien faire, ils lui répondent que personne ne les a embauchés. Sur quoi, il les envoie, eux aussi, travailler dans sa vigne. Nous n’avons aucune indication du salaire que ces ouvriers de la onzième heure allaient toucher pour une heure de travail. Il se peut qu’ils se soient dit que, s’ils acceptaient d’y aller à cette heure tardive, même pour un salaire minime, le propriétaire les embaucherait pour toute la journée du lendemain. Peu après, la journée de travail s’achève et l’heure est venue de payer les ouvriers.

Le soir, le propriétaire du vignoble dit à son administrateur : « Fais venir les ouvriers et donne–leur la paye. Tu commenceras par ceux qui ont été engagés les derniers, pour finir par les premiers.»[8]

À ce moment-là, un nouvel élément apparaît dans l’histoire. Le propriétaire a un intendant, un régisseur qui administre son domaine à sa place. Immédiatement, la question qu’ont dû se poser les auditeurs de Jésus fut celle-ci : pour quelle raison est-ce le propriétaire, plutôt que le régisseur, qui est allé embaucher les journaliers. En général, les propriétaires qui avaient un intendant ne s’embarrassaient de la conduite quotidienne des affaires de leur ferme, et ils n’allaient pas traîner sur la place du marché cinq fois par jour pour embaucher des ouvriers. Et d’ailleurs, comment se fait-il que le propriétaire n’ait pas embauché suffisamment d’ouvriers dès le matin et que, ce jour-là, il soit retourné quatre fois au marché?

Bien entendu, il s’agit d’une parabole ; Jésus ne rapporte pas une situation réelle. La raison pour laquelle c’est le propriétaire de la vigne qui embauche lui-même les journaliers et qui se rend au marché à cinq moments différents de la journée pour en embaucher d’autres,  c’est que cela sert à souligner le message que Jésus entend faire passer, comme nous allons bientôt le voir.

Les auditeurs originels étaient probablement tout aussi intrigués par les étranges instructions que le propriétaire avait donné à son régisseur, concernant la paie des ouvriers. Bizarrement, le régisseur reçoit l’ordre de payer les premiers arrivés en dernier, et de commencer par payer les derniers arrivés. Nous allons voir que l’ordre dans lequel les ouvriers sont payés va causer quelques problèmes.

Les ouvriers embauchés à cinq heures du soir se présentent d’abord et touchent chacun une pièce d’argent. Puis vient le tour des premiers engagés : ils s’attendent à recevoir davantage, mais eux aussi touchent chacun une pièce d’argent.[9]

Nous le savons, les paraboles fournissent peu de détails, et cette parabole évoque simplement le paiement fait aux premiers et aux derniers journaliers arrivés. Cela voudrait donc dire que tous les ouvriers qui ont travaillé ce jour-là, ont chacun reçu une pièce d’argent, soit le salaire d’une journée complète de travail, quel que soit le nombre d’heures effectuées. Quand les ouvriers qui avaient travaillé toute la journée voient que ceux qui n’avaient travaillé qu’une heure reçoivent le salaire de toute une journée de travail, ils s’attendent à être payés davantage. De leur point de vue, c’était logique. Pourtant, eux aussi reçoivent une pièce d’argent comme tous les autres.

Si le propriétaire avait commencé par payer le salaire des ouvriers qui avaient travaillé toute la journée, ils seraient partis sans savoir combien les autres seraient payés. Tout le monde aurait été content et serait rentré chez soi. Or, les ouvriers qui avaient été embauchés de bon matin voient que ceux qui n’avaient travaillé qu’un douzième de la journée reçoivent le salaire d’une journée complète, et ils ont l’impression d’avoir été floués. À l’époque, il y avait une pièce de monnaie en circulation appelée pandion[10], et qui valait le douzième d’un denier en argent. Ceux qui avaient travaillé toute la journée estimaient sans doute que ceux qui n’avaient travaillé qu’une heure ne méritaient pas plus qu’un pandion comme salaire, ou bien que le propriétaire, s’il voulait être équitable, devrait les payer davantage. Et d’ailleurs ils ne se gênent pas pour dire ce qu’ils pensent au propriétaire.

Lorsqu’ils la reçoivent, ils manifestent leur mécontentement à l’égard du propriétaire : « Ceux–là sont arrivés les derniers, disent–ils, ils n’ont travaillé qu’une heure, et tu leur as donné autant qu’à nous, qui avons travaillé dur toute la journée, sous la forte chaleur. »[11]

Ils se plaignent d’avoir reçu le même salaire et d’avoir été traités comme ceux qui n’ont travaillé qu’une heure. Ils font valoir que le propriétaire ne prend pas en compte le fait qu’ils ont travaillé une journée entière sous un soleil brûlant. Autrement dit, ils accusent le propriétaire d’être injuste et de les traiter injustement.

Ayant écouté leurs griefs, le propriétaire leur répond en s’adressant directement à l’un d’entre eux, celui qui était probablement leur porte-parole.

Mais le maître répond à l’un d’eux : « Mon ami, dit–il, je ne te fais pas le moindre tort. Une pièce d’argent : n’est–ce pas le salaire sur lequel nous étions d’accord ? »[12]

Le mot qui a été traduit en français par « ami » est le mot grec hetairos qui apparaît dans deux autres versets de l’Évangile de Matthieu: une première fois, lorsqu’un homme, qui s’était présenté à un mariage sans habits de noces, se fait expulser de la noce, et une deuxième fois, quand Jésus appelle Judas, « mon ami », alors qu’Il sait que Judas est en train de Le trahir.[13]De toute évidence, quand le propriétaire de la vigne appelle l’homme, « mon ami », ce n’est pas un terme très flatteur dans sa bouche.

À la question posée par le propriétaire, on ne peut que répondre affirmativement, étant donné que les ouvriers s’étaient bien mis d’accord pour percevoir un salaire d’une pièce d’argent en échange de leur journée de travail. En leur versant cette somme, le propriétaire a bien tenu parole.

Comme c’est souvent le cas avec les paraboles, nous découvrons ce que Jésus essaie de nous faire comprendre à la fin, quand le propriétaire déclare :

« Prends donc ce qui te revient et rentre chez toi. Si cela me fait plaisir de donner au dernier arrivé autant qu’à toi, cela me regarde. Ne puis–je pas disposer de mon argent comme je le veux ? Ou bien, m’en veux–tu parce que je suis bon ? »[14]

Dans d’autres versions de la Bible comme, par exemple la Louis Segond (LSG), la Darby (DRB), la Traduction Œcuménique de la Bible (TOB), et d’autres, la phrase : « M’en veux–tu parce que je suis bon ? » est rendue par : « Verrais–tu d’un mauvais œil que je sois bon ? » ou « Ton œil est–il méchant, parce que moi, je suis bon ? » C’est une traduction littérale du grec, qui exprime un idiome hébreu. Comme l’explique un auteur :

La réponse du propriétaire magnanime fait référence aux expressions hébraïques, « mauvais œil » et « bon œil », qui indiquent un contraste marqué entre une personne généreuse et pleine de bonté d’une part, et un individu égoïste et mesquin, d’autre part. La personne généreuse, qui a un « bon œil », est animée d’une volonté d’aider les autres et veille à ce que leurs besoins soient satisfaits. La personne égoïste ne s’intéresse qu’à ce qui lui revient et lui appartient.[15]

Les ouvriers qui avaient travaillé toute la journée n’avaient pas compris que le propriétaire s’était montré généreux envers ceux qui étaient dans le besoin. Ils ne se réjouissaient pas de la chance qu’avaient eue les ouvriers embauchés plus tard dans la journée. Au contraire, ils ne pensaient qu’à eux et ils estimaient que l’employeur les traitait injustement.

Le propriétaire leur fait comprendre qu’il a le droit de faire ce qu’il veut de son argent. Il a choisi d’en donner à ceux qui étaient dans le besoin. Puis il leur demande s’ils lui en veulent de s'être montré généreux, et s’ils sont jaloux parce qu’il a fait du bien aux autres ?

Selon les normes communément admises, les actes du propriétaire seraient considérés comme injustes. Mais le propriétaire n’agissait pas en fonction des critères habituels. Il était juste, puisqu’il avait tenu sa promesse de payer le salaire convenu. Les ouvriers, qui avaient accepté de travailler pour ce salaire, n’avaient pas été floués. S’ils avaient reçu leur salaire en premier, ils n’auraient rien su de ce que les autres percevraient et ils seraient rentrés chez eux la tête haute, contents d’avoir ramené le salaire d’une journée complète de travail.

Mais qu’en était-il des autres ouvriers? Eux aussi avaient une famille à nourrir. Il fallait bien qu’eux aussi rentrent chez eux la tête haute, ce qu’ils allaient maintenant pouvoir faire. Sans doute ne méritaient-ils pas le salaire d’une journée de travail puisqu’ils n’avaient pas travaillé une journée entière. Cependant, grâce à la générosité du propriétaire, ils avaient reçu un salaire plus élevé qu’ils ne méritaient. Non seulement le propriétaire est juste mais en plus, il a de la compassion.

Cette parabole nous renseigne sur la nature de Dieu. Dieu est juste et Il tient ses promesses. Il est aussi très miséricordieux. La miséricorde n’a rien à voir avec la justice. La miséricorde ne consiste pas à donner aux gens ce qu’ils méritent ou ce qu’ils ont gagné. C’est un acte d’amour. Elle consiste à donner à quelqu’un quelque chose qu’il ne mérite pas, et c’est précisément la nature de l’amour de Dieu, de sa grâce et de son salut. 

Dieu ne se limite pas à ce que nous, les hommes, considérons comme juste et équitable. Si c’était le cas, il n’y aurait aucun espoir de salut, ni de pardon des péchés. Si nous ne recevions que ce que nous méritons, nous serions tous condamnés. Mais à l’instar des ouvriers qui ne méritaient pas de recevoir le salaire d’une journée entière de travail, avec le salut, nous bénéficions tous de la générosité de Dieu, de sa compassion, de sa miséricorde et de sa grâce.

Un auteur émet l’hypothèse que la raison pour laquelle le propriétaire de la vigne revient à plusieurs reprises sur la place du marché n’était pas parce qu’il avait besoin de plus de main-d’œuvre, mais parce qu’il savait que ces hommes, qui cherchaient du travail, avaient besoin d’aide. Il n’était pas motivé par le besoin de les faire travailler sur sa vigne ou de leur faire vendanger la vigne, mais par la compassion qu’il ressentait envers ces hommes et leurs familles.

La beauté de cette histoire, c’est que grâce à la compassion et à la générosité du propriétaire – de l’employeur – tout le monde a eu ce dont il avait besoin. Ce n’était pas une question d’avoir trop payé certains ouvriers et de ne pas avoir assez payé les autres. Il s’agissait de faire preuve d’amour et de répondre à un besoin.

Personnellement, je trouve que cette parabole est une magnifique illustration de l’appel de Dieu au salut. Certains reçoivent l’appel ou saisissent l’occasion lorsqu’ils sont jeunes, d’autres plus tard, et d’autres encore sur leur lit de mort. Comme le propriétaire de la vigne, Dieu revient plusieurs fois sur la place du marché pour voir qui est là, et qui est fin prêt. Qu’une personne soit sauvée tôt dans la vie ou plus tard, tous reçoivent le même salut. 

Cette parabole nous en dit long sur le salut, et sur la nature aimante et compatissante de Dieu. Elle aborde aussi d’autres questions importantes. Elle nous interpelle sur notre attitude quand nous voyons Dieu manifester son amour et ses bienfaits aux autres. Les ouvriers, qui avaient travaillé dur toute la journée sous une grosse chaleur, furent bénis en percevant le salaire de toute une journée, ils reçurent ce qui leur avait été promis. Et pourtant, quand ils virent que ceux qui n’avaient pas travaillé aussi dur ni aussi longtemps, percevaient le même salaire, ils en voulurent au propriétaire.

Il est intéressant de noter que cette parabole survient tout de suite après que Pierre eut demandé à Jésus ce qu’il en serait des disciples qui avaient tout quitté pour Le suivre.[16] Quelques versets plus loin, nous voyons la mère de Jean et Jacques demander à Jésus que ses fils puissent s’asseoir à sa droite et à sa gauche dans son royaume, ce qui provoque l’indignation des autres disciples.[17] Jésus profite de l’occasion pour déclarer que le plus grand parmi eux doit se comporter en serviteur.[18]

En plus de nous donner un bon aperçu de la nature intime de Dieu, cette parabole rappelle aussi à tous ceux qui sont sauvés, et en particulier à ceux qui servent le Seigneur, que la promesse d’une récompense n’est pas censée donner lieu à des conjectures sur qui recevra la plus grosse récompense. Cette parabole montre que le système de récompenses de Dieu va bien au-delà de la notion humaine de justice. Ses voies, ses pensées et ses notions de jugements et de récompenses fonctionnent sur un plan beaucoup plus élevé que le nôtre. Il ne se limite pas à un simple décompte d’heures de travail ou à la prise en compte de la pénibilité des tâches effectuées. Comme l’a écrit à juste titre Arland Hultgren : 

Tout comme personne n’a aucune raison d’en vouloir à un homme bon qui dépasse la simple notion de justice et fait preuve de générosité envers les pauvres, personne non plus n’a de raison d’en vouloir à Dieu pour sa bonté et sa miséricorde, comme si les récompenses de Dieu relevaient d’un strict exercice comptable.[19]

Si d’autres paraboles traitent de la question des différents niveaux de récompenses, celle-ci n’aborde pas le sujet. Peu importe à quel moment les gens deviennent chrétiens ou commencent à servir Dieu, ils seront récompensés. Dans cette parabole, nous voyons que Dieu est à la fois juste et très généreux. Ceux qui sont arrivés « en retard » ont reçu un salaire bien plus élevé que ce qu’ils s’attendaient à recevoir. Quelques versets auparavant, Jésus avait dit:

Tous ceux qui auront quitté, à cause de Moi, leurs maisons, leurs frères ou leurs sœurs, leur père ou leur mère, leurs enfants ou leur terre, recevront cent fois plus et auront part à la vie éternelle.[20]

Donc, ceux qui ont travaillé toute la journée sous la forte chaleur recevront une juste récompense de Dieu. Il fera preuve de justice et de générosité envers tous ceux qui viendront à Lui.

En appliquant l’enseignement de la parabole aux ouvriers du Seigneur d’aujourd’hui, Thomas Constable écrit :

Les disciples modernes de Jésus devraient considérer les récompenses célestes de la même façon. La seule raison pour laquelle nous recevrons une récompense, c’est que Dieu nous a appelés à son service. Nous pouvons compter sur Dieu pour nous traiter équitablement, avec gentillesse et généreusement, que nous servions le Seigneur durant toute notre vie, ou seulement pendant un cours laps de temps, si nous sommes devenus ses disciples plus tard dans la vie.[21]

En plus d’aborder les questions des récompenses et de la générosité de Dieu, certains aspects de cette parabole s’appliquent à notre vie de tous les jours. Le fait d’envier les bénédictions ou le succès des autres, ou d’être jaloux de la façon dont Dieu s’occupe de quelqu’un ou dont Il subvient à ses besoins, reflète l’attitude des ouvriers qui en voulaient au propriétaire à cause de sa générosité. Cela va à l’encontre des valeurs du royaume de Dieu. Plutôt que d’être envieux ou jaloux, nous devrions nous réjouir de voir à quel point Dieu est généreux et miséricordieux. Nous devrions nous réjouir avec les gens que Dieu bénit.[22]

Il ne faut pas non plus perdre de vue que, comme le propriétaire de la vigne, Dieu a ses raisons bien à Lui de choisir qui Il bénit. Nous ne comprenons peut-être pas pourquoi une personne que nous estimons indigne de ses faveurs est, en apparence, aussi bénie, ni pourquoi une personne qui est, à nos yeux, bien plus méritante, ou qui a un plus grand besoin, doit faire face à des épreuves et à de grosses difficultés. Certaines situations peuvent nous paraître tout à fait injustifiées et injustes. Auquel cas, il est bon de se rappeler que le Seigneur est amour, et qu’Il est juste et miséricordieux. S’il est vrai que nous ne comprenons pas toujours ce qu’Il fait, nous devrions  quand même Lui faire confiance. Dans cette vie-ci, nous n’aurons jamais qu’une compréhension limitée de tout ce que Dieu est et de tout ce qu’Il fait. Nous ne pouvons pas comprendre toutes ses voies, mais dans la vie future, tout sera certainement beaucoup plus clair. Nous comprendrons alors ce que nous avons eu du mal à comprendre ici-bas. Et à ce moment-là, nous serons assurément frappés d’émerveillement par sa bonté, son amour, sa sagesse, et sa justice. Aujourd’hui, on nous demande d’avoir confiance; demain nous comprendrons et nous nous réjouirons.

Jésus nous demande de mettre de côté nos concepts limités de ce qui est juste et de ce qui ne l’est pas, pour ce qui concerne Dieu et ses bénédictions et ses récompenses. Nous devrions garder à l’esprit que nous sommes tous des ouvriers de la onzième heure. Il y aura toujours quelqu’un qui en a fait plus que vous et moi au service de Dieu. Pensez aux apôtres, aux martyrs, ou à n’importe lequel ou laquelle de nos frères et sœurs chrétiens qui ont servi le Seigneur au cours des siècles passés, ou qui Le servent aujourd’hui à nos côtés.

Nous devrions nous réjouir de ce que chacun de nous est aimé et accepté par Dieu, non pas à cause de ce que nous faisons, mais en raison de sa nature. Il nous a sauvés, non pas en raison de nos bonnes œuvres, mais en raison de sa grâce et de son amour. Ce n’était pas dû à nos efforts; c’était le fait de sa miséricorde. Aucun de nous ne mérite son amour, ses bénédictions ou ses récompenses. Nous avons tous reçu bien plus que ce que nous méritions de la main de notre Père généreux et compatissant. Et chaque fois que nous le pouvons, tâchons d’imiter son amour et sa compassion dans nos rapports avec les autres. 


Le propriétaire compatissant, Matthieu 20 :1–16

1 Voici, en effet, à quoi ressemble le royaume des cieux : un propriétaire sort le matin de bonne heure afin d'embaucher des ouvriers pour travailler dans son vignoble.

2 Il convient avec eux de leur donner comme salaire une pièce d'argent pour la journée, puis il les envoie dans sa vigne.

3 Vers neuf heures du matin, il sort de nouveau et en aperçoit d'autres qui se tiennent sur la place du marché sans rien faire.

4 Il leur dit : « Vous aussi, allez travailler dans ma vigne et je vous paierai correctement. »

5 Ils y vont. Il sort encore vers midi, puis vers trois heures de l'après-midi et, chaque fois, il agit de la même manière.

6 Enfin, étant ressorti à cinq heures du soir, il en trouve encore d'autres sur la place. Il leur dit : « Pourquoi restez-vous ainsi toute la journée à ne rien faire ? »

7 « C'est que personne ne nous a embauchés. » « Eh bien, vous aussi, allez travailler dans ma vigne ! »

8 Le soir, le propriétaire du vignoble dit à son administrateur : « Fais venir les ouvriers et donne-leur la paye. Tu commenceras par ceux qui ont été engagés les derniers, pour finir par les premiers. »

9 Les ouvriers embauchés à cinq heures du soir se présentent d'abord et touchent chacun une pièce d'argent.

10 Puis vient le tour des premiers engagés : ils s'attendent à recevoir davantage, mais eux aussi touchent chacun une pièce d'argent.

11 Lorsqu'ils la reçoivent, ils manifestent leur mécontentement à l'égard du propriétaire :

12 « Ceux-là sont arrivés les derniers, disent-ils, ils n'ont travaillé qu'une heure, et tu leur as donné autant qu'à nous qui avons travaillé dur toute la journée sous la forte chaleur. »

13 Mais le maître répond à l'un d'eux : « Mon ami, dit-il, je ne te fais pas le moindre tort. Une pièce d'argent : n'est-ce pas le salaire sur lequel nous étions d'accord ?

14 Prends donc ce qui te revient et rentre chez toi. Si cela me fait plaisir de donner au dernier arrivé autant qu'à toi, cela me regarde.

15 Ne puis-je pas disposer de mon argent comme je le veux ? Ou bien, m'en veux-tu parce que je suis bon ? »

16 Voilà comment les derniers seront les premiers et comment les premiers seront les derniers.


NB :

Sauf indication contraire, les passages bibliques cités sont extraits de la Sainte Bible, version du Semeur, copyright ©2000 par la Société Biblique Internationale. Tous droits réservés. Avec permission.


[1] Matthieu 13:31, 33, 44, 45, 47; Luke 6:47–49, 7:31–32, 13:18–21.

[2] Matthieu 20:1.

[3] Voir aussi : « Tu n’exploiteras pas ton prochain et tu ne le voleras pas. Tu ne retiendras pas le salaire d’un ouvrier jusqu’au lendemain matin. » (Lévitique 19:13).

[4] Matthieu 20:2.

[5] Matthieu 20:3–5.

[6] Matthieu 20:5.

[7] Matthieu 20:6–7.

[8] Matthieu 20:8.

[9] Matthieu 20:9–10.

[10] T.W. Manson, Les paroles de Jésus (Grand Rapids: William B. Eerdmans, 1979), 220.

[11] Matthieu 20:11–12.

[12] Matthieu 20:13.

[13] Matthieu 22:12, 26:50.

[14] Matthieu 20:14–15.

[15] Brad H. Young, Jésus, le Théologien Juif (Grand Rapids: Baker Academic, 1995), 136.

[16] Matthieu 19:27.

[17] Matthieu 20:20–24.

[18] Matthieu 20:25–28.

[19] Arland J. Hultgren, Les Paraboles de Jésus (Grand Rapids: William B. Eerdmans, 2000), 377.

[20] Matthieu 19:29.

[21] Thomas L. Constable, Notes sur Matthieu, édition de 2013.

[22] Romains 12:15.

 

Copyright © 2024 The Family International. Politique de confidentialité Politique des cookies